Comment réussir sans la calculatrice ?

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Comment réussir sans la calculatrice.

La calculatrice est un outil qui calcule plus vite que nous. Faire appel à un outil a toujours deux effets. Le premier est celui que l’on attend c’est-à-dire nous permettre d’être efficace. Le second est sa contrepartie qui est la perte de certaines compétences. Prenons l’exemple des allumettes ou d’un briquet qui sont des outils performants pour allumer un feu. Leur utilisation régulière fait qu’aujourd’hui, seuls quelques initiés peuvent s’en passer.

Autre analogie, Lorsqu’un astronaute effectue un séjour prolongé dans la station spatiale internationale. Plus il reste longtemps en microgravité plus il risque d’avoir une atrophie des muscles. À son retour sur terre il devra subir une rééducation afin de pouvoir marcher.

L’usage excessif de la calculatrice est comparable car l’absence d’efforts pour effectuer les calculs a les mêmes conséquences sur nos compétences.

Le pire est que, désormais en France, la calculatrice est autorisée dès l’école primaire. Ce qui, de mon point de vue, est catastrophique car c’est la période où l’on apprend les algorithmes de l’addition, de la soustraction, de la multiplication et de la division. Par conséquent, beaucoup d’élèves ne sauront pas correctement effectuer ces opérations.

À partir du collège, la calculatrice n’est plus seulement autorisée, elle est imposée. Et comme deux nouvelles opérations, l’exponentiation et l’extraction, sont insuffisamment pratiquées, certains élèves arrivent au lycée en ayant une idée floue du calcul numérique.

C’est comme si, lors de leçons de pilotage, un instructeur obligeait ses élèves à utiliser en permanence le pilote automatique. Quel est le contenu objectif de ces cours ? Comment les futurs pilotes pourraient réagir en cas de panne ? Je vous renvoie à l’affaire des Boeing 737 où les pilotes les plus expérimentés avaient identifié les dysfonctionnements du pilote automatique et, après les avoir désactivés, avait pu poser leurs avions.

Encore un autre exemple, cette fois ci pour un athlète. Il serait complètement absurde de s’entraîner à un marathon à moto. Lors de l’épreuve, le coureur serait rapidement en manque de condition physique et s’effondrerait avant la fin.

Dans les deux cas, une grosse part de l’information ne peut être acquise. Sans compter la perte d’habitude et d’endurance.

Nous pouvons parler d’un troisième cas. Prenons l’exemple du football ou du basketball. Si le joueur ne maîtrise pas les gestes techniques de base comme réceptionner ou passer un ballon alors il ne pourra pas appliquer les stratégies d’un entraîneur.

On a le même effet néfaste à cause d’un mauvais usage de la calculatrice. Si on ne sait pas effectuer les opérations fondamentales du calcul numérique alors on ne pourra pas comprendre le calcul littéral. Ce dernier en étant une généralisation.

Je peux en témoigner car, dans mon travail, je passe beaucoup de temps à enseigner à des lycéens toutes les opérations fondamentales afin de les aider à se mettre à nveau.

Si mon témoignage ne suffit pas, je vous renvoie vers les classements internationaux comme le PISA. Ces classements permettent de comparer les niveaux des élèves de plusieurs pays à partir de l’école primaire. Chaque année, le classement de la France empire. Attention ! Je ne dis pas que l’usage de la calculatrice est la seule raison pour laquelle cela se produit. En revanche, je pense qu’il s’agit d’un des facteurs les plus importants. Surtout que la plupart des pays qui occupent les premières places de ces classements, insistent plutôt sur une pédagogie mettant en avant l’expérience sensible.

Sachant, en outre, que les économies sont mondialisées et que nos élèves sont amenés à devenir des travailleurs. La concurrence issue de ces pays sera particulièrement rude. Posez vous la question, qu’est-ce qui est plus rentable ? Un travailleur qui a besoin d’un ordinateur, d’une calculatrice et d’une tablette numérique. Ou alors un travailleur qui effectue les mêmes tâches avec un stylo et ses connaissances ? Nous sommes en plus au début de l’ère de l’intelligence artificielle. Bientôt, dans nos « pays avancés » on se passera de certains employés qui nécessiteront de toute façon d’investir dans du matériel informatique.

Si nous voulons faire face à ces différents types de concurrence. Si nous voulons nous renforcer. Si nous voulons être plus affutés intellectuellement. Si nous voulons réussir à nous hisser en haut des classements. Plus simplement, pour nous permettre de progresser alors il faut se passer de calculatrice à l’entrainement.

Mais comment réussir sans elle ? Comment rattraper le retard pris après une trop longue période d’utilisation ?

Voyons ensemble les trois étapes que je recommande pour y arriver.

Première étape. Se réapproprier les algorithmes fondamentaux et les astuces associées.

Il est crucial de commencer par réapprendre à poser les additions, les soustractions, les multiplications et les divisions. Ensuite, en complément, il ne faut pas craindre de compter avec ses doigts. L’expérience sensible est excellente pour se représenter des quantités. Cela ne doit pas empêcher d’apprendre par cœur les tables de multiplications - au moins jusqu’à dix – et, au-delà, d’apprendre les carrés – au moins jusqu’au carré de vingt.

Avec ces premières étapes, je recommande de connaître les astuces de multiplication et de division par dix, cent ou mille et, plus généralement, par toutes les puissances de dix. Cela sera très utile pour réussir à écrier des calculs avec des nombres à virgule sous forme de calcul fractionnaire. S’il y a un secret, il est bien là. Il faut toujours essayer de revenir à un calcul avec des nombres entiers car, comme je l’ai dit, on peut se les représenter aisément. Plus généralement, il faut essayer de se représenter les calculs grâce à une situation concrète. La meilleure comparaison est avec l’argent. On a des réflexes en comptant l’argent que l’on a pas avec des nombres théoriques. Surtout en ce qui concerne le calcul algébrique. Il est facile de comprendre que le symbole « plus » correspond à un gain alors que le symbole « moins » correspond à une perte.

Si tout cela est maîtrisé alors on peut passer à la seconde étape. Comprendre l’enchaînement des opérations.

Je reviens un instant à mon travail d’enseignant en accompagnement scolaire. Je suis trop souvent étonné de constater que les élèves ne savent pas que l’on n’effectue pas toutes les opérations d’une expression algébrique en même temps. Je dois régulièrement rappeler, dans un premier le vocabulaire associé aux opérations puis ensuite les règles de priorités opératoires. D’ailleurs, au début, j’oblige mes élèves à respecter cet ordre sans faire usage de formule. Cette obligation dure jusqu’à cela devienne concret pour eux. Je l’exige car, au début, ils n’arrivent pas à faire un bon usage de ces formules de calculs. Ils prennent des raccourcis et ne les appliquent pas au bon moment.

Ce n’est qu’après avoir compris l’importance de l’enchainement des opérations que je les autorise à passer à la dernière étape.

S’emparer des formules de calcul littéral.

Comme je le disais, apprendre à s’en servir est plus simple lorsque l’on a compris les règles de priorités. Toutefois, on ne commence pas par n’importe laquelle d’entre elles.

Je recommande de débuter par les formules d’associativité, de commutativité et de distributivité. Ces formules concernent l’addition et la multiplication uniquement. De plus, pour la multiplication, il y a des élèves qui confondent associativité et distributivité. L’associativité s’applique lorsque l’on multiplie deux nombres et que l’on multiplie le résultat par un autre nombre. La distributivité s’applique lorsque l’on additionne deux nombres et que l’on multiplie le résultat par un autre nombre. J’espère que cette situation vous permet de faire le lien avec l’enchainement des opérations.

Par la suite, on pourra apprendre les formules de développement, de factorisation et les identités remarquables.

Enfin, il faut maîtriser toutes formules de calculs avec les fractions. L’addition et la soustraction avec le même dénominateur. L’addition et la soustraction avec des dénominateurs différents. La multiplication de fractions et même la division.

Il y aura d’autres formules qui feront appel à des concepts plus abstraits, mais le fait d’avoir de bonnes bases permettra de pouvoir s’adapter.

Voilà pour les trois étapes. J’encourage à appliquer le plus tôt possible ces conseils.

Surtout que, dans beaucoup de cursus post bac comme les classes préparatoires aux grandes écoles ou les parcours santé, la calculatrice est tout simplement interdite.

Indiquez-moi en commentaire si vous avez réussi à vous sevrer de votre machine à calculer. Si vous avez besoin d’aide, nous proposons un cours en ligne pour les élèves à partir de la classe de première, en autonomie, qui permet d’appliquer les étapes à son rythme. Ce programme s’appelle « ligne de départ ».

Dernière petite précision. Cet article n'a pas pour objectif de dire qu'il ne faut jamais utiliser une calculatrice. Elles sont utiles pour vérifier des calculs. En revanche il faut les bannir à l'entrainement.

À bientôt.